Un ami qui, après avoir beaucoup connu le monde, s’en est presque entièrement retiré et qui juge de loin, et comme du rivage, ce rapide tourbillon où l’on s’agite ici, m’écrivait récemment à propos de quelques aperçus sur le caractère des oeuvres contemporaines : « Tout ce que vous me dites de nos sublimes m’intéresse au dernier point. Vraiment, ils le sont ! Ce qui manque, c’est du calme et de la fraîcheur, c’est quelque belle eau pure qui guérisse nos palais échauffés. » Cette qualité de fraîcheur et de délicatesse, cette limpidité dans l’émotion, cette sobriété dans la parole, ces nuances adoucies et reposées, en disparaissant presque partout de la vie actuelle et des oeuvres d’imagination qui s’y produisent, deviennent d’autant plus précieuses là où on les rencontre en arrière, et dans les ouvrages aimables qui en sont les derniers reflets. On aurait tort de croire qu’il y a faiblesse et perte d’esprit à regretter ces agrémens envolés, ces fleurs qui n’ont pu naître, ce semble, qu’à l’extrême saison d’une société aujourd’hui détruite. Les peintures nuancées dont nous parlons supposent un goût et une culture d’âme que la civilisation démocratique n’aurait pas abolis sans inconvénient pour elle-même, s’il ne devait renaître dans les moeurs nouvelles quelque chose d’analogue un jour. La société moderne, lorsqu’elle sera un peu mieux assise et débrouillée, devra avoir aussi son calme, ses coins de fraîcheur et de mystère, ses abris propices aux sentimens perfectionnés, quelques forêts un peu antiques, quelques sources ignorées encore. Elle permettra, dans son cadre en apprence uniforme, mille distinctions de pensées et bien des formes rares d’existences intérieures ; sans quoi elle seraient sur un point très au-dessous de la civilisation précédente et ne satisferait que médiocrement toute une fouille d’âmes. Dans les momens de marche ou d’installation incohérente et confuse, comme le sont les temps présens, il est simple qu’on aille au plus important, qu’on s’occupe du gros de la manoeuvre, et que de toutes parts, même en littérature, ce soit l’habitude de frapper fort, de viser haut et de s’écrier par des trompettes ou des portevoix. Les grâces discrètes reviendront peut-être à la longue, et avec une physionomie qui sera appropréiée à leurs nouveaux alentours ; je veux le croire ; mais, tout en espérant au mieux, ce ne sera pas demain sans doute que se recomposeront leurs sentimens et leur langage. En attendant, l’on sent ce qui manque, et parfois l’on en souffre : on se reprend, dans certaines heures d’ennui, à quelques parfums du passé, d’un passé d’hier encore, mais qui ne se retrouvera plus ; et voilà comment je me suis remis l’autre matinée à relire Eugène de Rothelin, Adèle de Senange, et pourquoi j’en parle aujourd’hui.
Une jeune fille qui sort pour la première fois du couvent où elle a passé toute son enfance, un beau lord élégant et sentimental, comme il s’en trouvait vers 1780 à Paris, qui la rencontre dans un léger embarras et lui apparaît d’abord comme un sauveur, un très-vieux mari, bon, sensible, paternel, jamais ridicule, qui n’épouse la jeune fille que pour l’affranchir d’une mère égoïste et lui assurer fortune et avenir ; tous les événemens les plus simples de chaque jour entre ces trois êtres qui, par un concours naturel de circonstances, ne vont plus se séparer jusqu’à la mort du vieillard ; des scènes de parc, de jardin, des promenades sur l’eau, des causeries autour d’un fauteuil ; des retours au couvent et des visites aux anciennes compagnes ; un babil innocent, varié, railleur ou tendre, traversé d’éclairs passionnés ; la bienfaisance se mêlant, comme pour le bénir, aux progrès de l’amour ; puis, de peur de trop d’uniformes douceurs, le monde au fond, saisi de profil, les ridicules ou les noirceurs indiqués, plus d’un original ou d’un sot marqué d’un trait divertissant au passage ; la vie réelle en un mot, embrassée dans un cercle de choix ; une passion croissante, qui se dérobe, comme ces eaux de Neuilly, sous les rideaux de verdure et se replie en délicieuses lenteurs ; des orages passagers, sans ravages, semblables à des pluies d’avril ; la plus difficile des situations honnêtes menée à fin jusque dans ses moindres alternatives, avec une aisance qui ne penche jamais vers l’abandon, avec une noblesse de ton qui ne force jamais la nature, avec une mesure indulgente pour tout ce qui n’est pas indélicat ; tels sont les mérites principaux d’un livre où pas un mot ne romp l’harmonie. Ce qui y circule et l’anime, c’est le génie d’Adèle, génie aimable, gai, mobile, ailé comme l’oiseau, capricieux et naturel, timide et sensible, vermeil de pudeur, fidèle, passant du rire aux larmes, plein de chaleur et d’enfance.
On était à la veille de la révolution, quand ce charmant volume fut composé ; en 93, à Londres, au milieu des calamités et des gênes ; l’auteur le publia. Cette Adèle de Sénange parut dans ses habits de fête, comme une vierge de Verdun échappée au massacre, et ignorant le sort de ses compagnes.
Madame de Souza, alors Madame de Flahaut, avant d’épouser fort jeune le comte de Flahaut, âgé déjà de cinquante-sept ans, avait été élevée au couvent de Paris. C’est ce couvent même qu’elle a peint sans doute dans Adèle de Sénange. Il y avait un hôpital annexé au couvent ; avec quelques pensionnaires les plus sages, et comme récompense, elle allait à cet hôpital tous les lundis soirs servir les pauvres et leur faire la prière. Elle perdit de bonne heure ses parens : les souvenirs du couvent furent ses souvenirs de famille : cette éducation première influa, nous le verrons, sur toute sa pensée, et chacun de ses écrits en retrace les vives images. Mariée, logée au Louvre, elle dut l’idée d’écrire à l’ennui que lui causaient les discussions poiltiques de plus en plus animées aux approches de la révolution ; elle était trop jeune, disait-elle, pour prendre goût à ces matières, et elle voulait se faire un intérieur. Dans le roman d’Emilie et Alphonse la duchesse de Candale, récemment mariée, écrit à son amie mademoiselle d’Astey : « Je me suis fait une petite retraite dans un des coins de ma chambre ; j’y ai placé une seule chaise, mon piano, ma harpe, quelques livres, une jolie table sur laquelle sont mes dessins et mon écritoire ; et là, je me suis tracé une sorte de cercle idéal qui me sépare du reste de l’appartement. Vient-on me voir ? je sors bien vite de cette barrière pour empêcher qu’on y pénètre ; si par hasard on s’avance vers mon asile, j’ai peine à contenir une mauvaise humeur ; je voudrais qu’on s’en allât. » Madame de Flahaut, en sa chambre du Louvre, dut se faire une retraite assez semblable à celle de Madame de Candale, d’autant plus qu’elle avait dans son isolement une intimité toute trouvée. Si on voulait franchir son cercle idéal, si on lui parlait politique, elle répondait que M. de Sénange avait eu une attaque de goutte, et qu’elle en était fort inquiète. Dans Eugénie et Mathilde, où elle a peint l’impression des premiers événemens de la révolution sur une famille noble, il est permis de lui attribuer une part du sentiment de Mathilde, qui se dit ennuyée à l’excès de cette révolution, toutes les fois qu’elle n’en est pas désolée. Adèle de Sénange fut donc écrite sans aucun apprêt littéraire, dans un simple but de passe-temps intime. Un jour pourtant, l’auteur, cédant à un mouvement de confiance qui lui faisait lever sa barrière idéale, proposa à un ami d’arranger une lecture devant un petit nombre de personnes ; cette offre, jetée en avant, ne fut pas relevée ; on lui croyait sans peine un esprit agréable, mais non pas un talent d’écrivain. Adèle de Sénange se passa ainsi d’auditeurs ; on sait que Paul et Virginie avait eu grand’peine à en trouver. La révolution parcourant rapidement ses phases, madame de Flahaut quitta Paris et la France après le 2 septembre. M. de Flahaut, emprisonné, fut bientôt victime. A force d’or et de diamans, prodigués par la famille et les amis du dehors à l’un des geôliers, il était parvenu à s’évader et vivait dans une cachette sûre. Mais quelqu’un raconta devant lui que son avocat venait d’être arrêté comme soupçonné de lui donner asile ; M. de Flahaut, pour justifier l’innocent, quitta sa retraite dès six heures du matin, et se rendit à la Commune où il se dénonça lui-même ; il fut peu de jours après guillotiné. Robespierre mort, madame de Flahaut partit d’Angleterre avec son fils, et vint en Suisse, espérant déjà rentrer en France ; mais les obstacles n’étaient pas levés. Rôdant toujours autour de cette France interdite, elle séjourna encore à Hambourg, et c’est dans cette ville que la renommée, désormais attachée à son nom par Adèle de Sénange, noua sa première connaissance avec M. de Souza, qu’elle épousa plus tard, vers 1802. Elle avait publié dans cet intevalle Emilie et Alphonse en 1799, Charles et Marie en 1801.
Charles et Marie est un gracieux et touchant petit roman anglais, un peu dans le goût de Miss Burney. Le paysage de parcs et d’élégans cottages, les moeurs, les ridicules des ladies chasseresses ou savantes, la sentimentalité languissante et pure des amans, y composent un tableau achevé qui marque combien ce séjour en Angleterre a inspiré naïvement l’auteur. Un critique ingénieux, et certes compétent en fait de délicatesse, M. Patin, dans un jugement qu’il a porté sur Madame de Souza (Répertoire de littérature), préfère ce joli roman de Charles et Marie à tous les autres. Pour moi, je l’aime, mais sans la même prédilection. Il y a, si je l’ose dire, comme dans les romans de Miss Burney, une trop grande profusion de tons vagues, doux jusqu’à la mollesse, pâles et blondissans. Madame de Souza dessine d’ordinaire davantage, et ses couleurs sont plus variées. C’est dans Charles et Marie que se trouve ce mot ingénieux, souvent cité : « Les défauts dont on a la prétention ressemblent à la laideur parée ; on les voit dans tout leur jour. »
Si le voyage en Angleterre, le ciel et la verdure de cette contrée, jetèrent une teinte lactée, vaporeuse, sur ce roman de Charles et Marie, on trouve dans celui d’Eugénie et Mathilde, qui parut seulement en 1811, des reflets non moins frappans de la nature du nord, des rivages de Hollande, des rades de la Baltique, où s’était assez longtemps prolongé l’exil de madame de Flahaut. « La verdure dans les climats du nord a une teinte particulière dont la couleur égale et tendre, peu à peu, vous repose et vous calme… Cet aspect ne produisant aucune surprise laisse l’âme dans la même situation ; état qui a ses charmes, et peut-être plus encore lorsqu’on est malheureux. Assises dans la campagne, les deux soeurs s’abandonnaient à de longues rêveries, se perdaient dans de vagues pensées, et, sans avoir été distraites, revenaient moins agitées. » Et un peu plus loin : « M. de Revel, dans la vue de distraire sa famille, se plaisait à lui faire admirer les riches pâturages du Holstein, les beaux arbres qui bordent la Baltique, cette mer dont les eaux pâles ne diffèrent point de celles des lacs nombreux dont le pays est embelli, et les gazons toujours verts qui se perdent sous les vagues. Ils étaient frappés de cette physionomie étrangère que chacun trouve à la nature dans les climats éloignés de celui qui l’a vu naître. La perspective riante du lac de Ploën les faisait en quelque sorte respirer plus à l’aise. Ne possédant rien à eux, ils apprirent, comme le pauvre, à faire leur délassement d’une promenade, leur récompense d’un beau jour, enfin à jouir des biens accordés à tous. » Madame de Souza d’ordinaire s’arrête peu à décrire la nature ; si elle le fait ici avec plus de complaisance, c’est qu’un souvenir profond et consolateur s’y est mêlé. La riante Adèle de Sénange, qui ne connaissait que les allées de Neuilly et les peupliers de son île, la voilà presque devenue, au bord de cette Baltique, la soeur de la rêveuse Valérie.
Adèle de Sénange, en effet, dans l’ordre des conceptions romanesques qui ont atteint à la réalité vivante, est bien soeur de Valérie, comme elle l’est aussi de Virginie, de mademoiselle de Clermont, de la princesse de Clèves, comme Eugène de Rothelin est un noble frère d’Adolphe, d’Edouard, du Lépreux, de ce chevalier des Grieux si fragile et si pardonné. Je laisse à part le grand René dans sa solitude et sa prédominance. Heureux celui qui, puisant en lui-même ou autour de lui, et grâce à l’déal ou grâce au souvenir, enfantera un être digne de la compagnie de ceux que j’ai nommés, ajoutera un frère ou une soeur inattendue à cette famille encore moins admirée que chérie ; il ne mourra pas tout entier !
Eugène de Rothelin, publié en 1808, parait à quelques bons juges le plus exquis des oovrages de madame de Souza, et supérieur même à Adèle de Sénange. S’il fallait se prononcer et choisir entre des productions presque également charmantes, nous serions bien embarrassé vraiment, car, si Eugène de Rothelin nous représente le talent de madame de Souza dans sa plus ingénieuse perfection, Adèle nous le fait saisir dans son jet le plus naturel, le plus voisin de la source, et pour ainsi dire, le plus jaillissant. Pourtant, comme art accompli, comme pouvoir de composer, de créer en observant, d’inventer et de peindre, Eugène est une plus grande preuve qu’Adèle. En appliquant ici ce que j’ai eu l’occasion de dire ailleurs au sujet de l’auteur d’Indiana et de Valentine, chaque âme un peu fine et sensible, qui oserait écrire sans apprêt, a en elle-même la matière d’un bon roman. Avec une situation fondamentale qui est la nôtre, situation qu’on déguise, qu’on dépayse légèrement dans les accessoires, il y a moyen de s’intéresser à peindre comme pour des mémoires confidentiels, et d’intéresser à notre émotion les autres. Le difficile est de récidiver lorsqu’on a dit ce premier mot si cher, lirsqu’on a exhalé sous une enveloppe plus ou moins trahissante ce secret qui parfume en se dérobant. Dans Adèle de Sénange la vie se partage en deux époques, un couvent où l’on a été élevée dans le bonheur durant des années, un mariage heureux encore, mais inégal par l’êge. Dans Eugène de Rothelin, l’auteur n’en est plus à cette donnée à demi personnelle et la plus voisine de son coeur ; ce n’est plus une toute matinale et adolescente peinture où s’échappent d’abord et se fixent vivement sur la toile bien des traits dont on est plein. Ici c’est un contour plus ferme, plus fini, sur un sujet plus désintéressé ; l’observation du monde y tient plus de place, sans que l’attendrissement y fasse faute ; l’affection et l’ironie s’y balancent par des demi-teintes savamment ménagées. La passion ingénue, coquette parfois, sans cesse attrayante, d’Athénaïs et d’Eugène, se détache sur un fond inquiétant de mystère ; même quand elle s’épanouit le long de ces terrasses du jardin ou dans la galerie vitrée, par une matinée de soleil, on craint M. de Rieux quelque part absent, on entrevoit cette figure mélancolique et sévère du père d’Eugène ; et, si l’on rentre au salon, cette tendresse des deux amans s’en vient retomber comme une guirlande incertaine autour du fauteuil aimable à la fois et redoutable de la vieille maréchale qui raille et sourit, et pose des questions sur le bonheur, un La Bruyère ouvert à ses côtés.
Marie-Joseph Chénier a écrit sur madame de Souza, avec la précision élégante qui le caractérise, quelques lignes d’éloges applicables particulièrement à Eugène : « Ces jolis romans, dit-il, n’offrent pas, il est vrai, le développement des grandes passions ; on n’y doit pas chercher non plus l’étude approfondie des travers de l’espèce humaine ; on est sûr au moins d’y trouver partout des aperçus très fins sur la société, des tableaux vrais et bien terminés, un style orné avec mesure, la correction d’un bon livre et l’aisance d’une conversation fleurie,… l’esprit qui ne dit rien de vulgaire et le goût qui ne dit rien de trop. » Mais indépendamment de ces louanges générales, qui appartiennent à toute une classe de maîtres, il faut dire d’Eugène de Rothelin qu’il peint le côté d’un siècle, un côté brillant, chaste, poétique, qu’on n’était guère habitué à y reconnaître. Sous cet aspect le joli roman cesse d’être une oeuvre individuelle et isolée, il a une signification supérieure ou du moins plus étendue.
Madame de Souza est un esprit, un talent qui se rattache tout-à-fait au dix-huitième siècle. Elle en a vu à merveille et elle en a aimé le monde, le ton, l’usage, l’éducation et la vie convenablement distribuée. Quon ne cherche pas quelle fut sur elle l’influence de Jean-Jacques ou de tel autre écrivain célèbre, comme on le pourrait faire pour madame de Staël, pour madame de Krüdner, pour mesdames Cottin ou de Montolieu. Madame de Flahaut était plus du dix-huitième siècle que cela, moins vivement emportée par l’enthousiasme vers des régions inconnues. Elle s’instruisit par la société, par le monde ; elle s’exerça à voir et à sentir dans un horizon tracé. Il s’était formé dans la dernière moitié du règne de Louis XIX, et sous l’influence de madame de Maintenon particulièrement, une école de politesse, de retenue, de prudence décente jusque dans les passions jeunes, d’autorité aimable et maintenue sans échec dans la vieillesse. On était pieux, on était mondain, on était bel-esprit, mais tout cela réglé, mitigé par la convenance. On suivrait à la trace cette succession illustre, depuis madame de Maintenon, madame de Lambert, madame de Deffand (après qu’elle se fut réformée), madame de Caylus et les jeunes filles qui jouaient Esther à Saint-Cyr, jusqu’à la maréchale de Beauvau (c’est bien elle et non pas la maréchale de Luxembourg, comme on l’a dit par erreur dans le tome 1er des Mémoires de madame de Créquy, qui a servi d’original au portrait de la maréchale d’Estouville), qui paraît avoir été l’original de la maréchale d’Estouville dans Eugène de Rothelin, jusqu’à cette marquise de Créquy qui est morte centenaire, et dont je crains bien qu’un homme d’esprit ne nous gâte un peu les mémoires (Dans un passage d’une bienveillance équivoque, l’auteur de ces Mémoires exprime, à propos du ton exquis de grand monde, qu’il ne peut refuser à l’auteur d’Adèle de Sénange, un étonnement singulier et tout-à-fait déplacé à l’égard de madame de Flahaut. Mais, quand les motifs sur lesquels l’auteur des Mémoires s’appuie ne seraient pas d’une exagération visible, son étonnement ne me paraîtrait pas plus fondé ; car, suivant moi, on n’est jamais en condition d’observer mieux, d’apprécier et de peindre plus finement ce monde-là, si l’on a le tact, que lorsque, n’en étant pas tout-à-fait, de bonne heure on y arrive.) Madame de Flahaut, qui était jeune quand le siècle mourut, en garda cette même portion d’héritage, tout en le modifiant avec goût et en l’accomodant à la nouvelle cour où elle dut vivre.
D’autres ont peint le dix-huitième siècle par des aspects moqueurs ou orageux, dans ses inégalités ou ses désordres, Voltaire l’a bafoué, Jean-Jacques l’a exalté et déprimé tour à tour. Diderot, dans sa Correspondance, nous le fait aimer comme un galant et brillant mélange ; Crébillon fils nous en déroule les conversations alambiquées et les licences. L’auteur d’Eugène de Rothelin nous a peint ce siècle en lui-même dans sa fleur exquise, dans son éclat idéal et harmonieux. Eugène de Rothelin est comme le roman de chevalerie du dix-huitième siècle, ce que Tristan le Léonais ou tel autre roman du treizième siècle était à la chevalerie d’ailleurs, ce que le petit Jehan de Saintré ou Galaor étaient au quinzième (Ce nom même de Rothelin, si gracieux et aimable à prononcer, rappelle une branche descendants du preux Dunois. L’abbé de Rothelin, cet ami bien doux et fidèle du cardinal de Polignac, en était.), c’est-à-dire quelque chose de poétique et de flatté, mais d’assez ressemblant. Eugène est le modèle auquel aurait dû aspirer tout homme bien né de ce temps-là, c’est un Grandisson sans fadeur et sans ennui ; il n’a pas encore ateint ce portrait un peu solennel que la maréchal lui a d’avance assigné pour le terme de ses vingt-cinq ans, ce portrait dans le goût de ceux que trace mademoiselle de Montpensier. Eugène, au milieu de ce monde de convenances et d’égards, a ses jalousies, ses allégresses, ses folies d’un moment. Un jour, il fut sur le point de compromettre par son humeur au jeu sa douce amie Athénaïs. – Quoi ! m’affliger ! lui dit celle-ci le lendemain ; ce qui est pis encore, risquer de perdre sur parole ! Eugène avoir un tort ! Je ne l’aurais pas cru. » Eugène a donc quelquefois un tort, Athénaïs a ses imprudences ; mais ils n’en sont que plus aimés. La mérechale tient dans l’action toute la partie moralisante, et elle en use avec un a-propos qui ne manque jamais son but ; Athénaïs et Eugène sont le caprice et la poésie, qui ont quelque peine à se laisser régler, mais qui finissent par obéir, tout en sachant attendrir leur maître. Lorsqu’à la dernière scène, dans une de ces allées droites où l’on se voit de si loin, madame d’Estouteville s’avance lentement, soutenue du bras d’Eugène, je sens tout se résumer pour moi dans cette image. Si jamais l’auteur a marié quelque part l’observation du moraliste avec l’animation du peintre, s’il a élevé le roman jusqu’au poème, c’est dans Eugène de Rothelin qu’il l’a fait. Qu’importe qu’en peignant son aimable héros, l’auteur ait cru peut-être proposer un exemple à suivre aux générations présentes, qui n’en sont plus là ; il a su tirer d’un passé récent un type non encore réalisé ou prévu, un type qui en achève et en décore le souvenir. – L’apparition d’Eugène fut saluée d’un quatrain de madame d’Houdetot.
Après Eugène de Rothelin, nous avons à parler encore de deux romans de madame de Souza, plus développés que ses deux précédens chefs-d’oeuvre , et qui sont eux-mêmes d’excellents ouvrages , Eugénie et Mathilde et la comtesse de Fargy. Le couvent joue un très-grand rôle en ces deux compositions, ainsi qu’on l’a vu déjà dans Adèle de Senange. Il y a en effet dans la vie et dans la pensée de Madame de Souza quelque chose de plus important que d’avoir lu Jean-Jacques ou La Bruyère, que d’avoir vu la révolution française, que d’avoir émigré et souffert, et assisté aux pompes de l’Empire, c’est d’avoir été élevée au couvent. J’oserai conjecturer que cette circonstance est demeurée la plus grande afaire de sa vie, et le fond le plus inaltérable de ses rêves. La morale, la religion de ses livres, sont exactes et pures ; toutefois ce n’est guère par le côté des ardeurs et des mysticités qu’elle envisage le cloître ; elle y voit peu l’expiation contrite des Héloïse et des La Vallière. L’auteur de Lélia, qui a été également élevée dans un couvent et qui en a reçu une impression très-profonde, a rendu avec un tout autre accent sa tranquillité fervente dans ces demeures. Mais j’ai dit que l’auteur de la Comtesse de Fargy, d‘Eugénie et Mathilde, appartient réllement par le goût au dix-huitième siècle. Le couvent, pour elle, c’est quelque chose de gai, d’aimable, de gémissant comme Saint-Cyr ; c’est une volière de colombes amies ; ce sont d’ordinaire les curiosités et les babils d’une volage innocence. « La partie du jardin, qu’on nommait pompeusement le bois, n’était qu’un bouquet d’arbres placés devant une très-petite maison tout-à-fait séparée du couvent, quoique renfermée dans ses murs. Mais c’est une habitude des religieuses de se plaire à donner de grands noms au peu qu’elles possèdent ; accoutumées aux privations, les moindres choses leur paraissent considérables. » Le couvent de Blanche, le couvent d’Eugénie, sont ainsi faits. Pourtant dans celui d’Eugénie, au moment de la dispersion des communautés par la révolution, il y a des scènes éloquentes, et cette prieure décharnée, qui profite avec joie de la retraite d’Eugénie pour gouverner la maison, ne fût-ce qu’un jour, est une figure d’une observation profonde.
La comtesse de Fargy se compose de deux parties entremêlées, la partie d’observation, d’obstacle et d’expérience, menée par madame de Nançay et par son vieil ami M. d’Entrague, et l’histoire sentimentale du marquis de Fargy et de son père. Cette dernière me plaît moins ; en général, à part Eugène de Rothelin et Adèle de Senange, le développement sentimental est moins neuf dans les romans de madame de Souza que ne le sont les observations morales et les piquantes causeries. Ces types de beaux jeunes gens mélancoliques, comme le marquis de Fargy, comme ailleurs l’Espagnol Alphonse, comme dans Eugénie et Mathilde le Polonais Ladislas, tombent volontiers dans le romanesque, tandis que le reste est de la vie réelle saisie dans sa plus fine vérité. Madame de Souza a voulu peindre, par la liaison du vieux M. d’Entrague et de madame de Nançay, ces amitiés d’autrefois, qui subsistaient cinquante ans, jusqu’à la mort. Comme on était mariée au sortir du couvent, par pure convenance, il arrivait que bientôt le besoin du coeur se faisait sentir ; on formait alors avec lenteur un lien de choix, un lien unique et durable ; cela se passait ainsi du moins là où la convenance régnait, et dans cet idéal de dix-huitième siècle, qui n’était pas, il faut le dire, universellement adopté. L’aimable M. d’Entrague, toujours grondé par madame de Nançay, toujours flatté par Blanche, et qui se trouve servir chaque projet de celle-ci sans le vouloir jamais, est un personnage qu’on aime et qu’on a connu, quoique l’espèce ne s’en voie plus guère. Madame de Nançay a vécu aussi, contrariante et bonne, et qu’avec un peu d’adresse on menait sans qu’elle s’en doutât : « Madame de Nançay rentre chez elle disposée à gronder tout le monde, elle n’ignorait pas qu’elle était un peu susceptible, car dans la vie on a eu plus d’une affaire avec soi-même, et si, l’on ne se connaît pas parfaitement, on se doute bien au moins de quelque chose. »
Eugénie et Mathilde, que nous avons déjà beaucoup cité, est le plus long et le plus soutenu des ouvrages de l’auteur, toujours Eugène et Adèle à part. L’auteur y a représenté au complet l’intérieur d’une famille noble pendant les années de la révolution. Eugénie qui a été forcée de quitter son couvent, et qui devient comme l’ange tutélaire des siens, attire constamment et repose le regard avec sa douce figure, sa longue robe noire, ses cheveux voilés de gaze, sa grande croix d’abbesse si noblement portée. Il y a un bien admirable sentiment entrevu, lorsqu’étant allée dans le parc respirer l’air frais d’une matinée d’automne, tenant entre ses bras le petit Victor, l’enfant de sa soeur, qui, attaché à son cou, s’approche de son visage pour éviter le froid, elle sent de vagues tendresses de mère passer dans son coeur ; et le comte Ladislas la rencontre au même moment. Ce qu’Eugénie a senti palpiter d’obscur, il n’est point donné à des paroles de l’exprimer, ce serait à la mélodie de le traduire.
(L’esquisse de ce motif virginal, que nous proposons à quelque gracieux compositeur, serait-celle-ci 🙂
LA PROMENADE D’EUGENIE.
– Eugénie parle. –
Dors, cher Enfant, je sens ta main légère
A mon cou nu mollement s’attacher,
Je sens ton front en mon sein se cacher ;
Dors, cher Enfant, je suis aussi ta mère !
Ta pauvre mère hélas ! est tout effroi
Pour son Edmond que son amour rappelle ;
Se dérobant, il est allé fidèle
Mêler son risque au péril de son roi.
Dans Eugénie et Mathilde, madame de Souza s’est épanchée personnellement plus peut-être que partout ailleurs.
A mon cou nu pose ta main légère ;
Dors, cher Enfant ; je suis aussi ta mère !
Tant de malheur peut-il fondre à plaisir,
Quand le matin rit dans la vapeur blanche,
Quand le rayon qui mourait sur la branche
Est en passant si tiède à ressaisir ?
A mon cou nu pose ta main légère ;
Dors, cher Enfant ; je suis aussi ta mère !
Mais, dès qu’ainsi ton doux soin m’est rendu,
D’où vient, Enfant, que ta bouche innocente
Soulève en moi le soupir, et qu’absente
J’aille peut-être au rêver défendu ?
Eveille-toi ! je sens ta main légère
A mon cou nu de trop près s’attacher ,
Ce front trop tiède en mon sein se cacher ;
Eveille-toi ! je ne suis point ta mère !
Tout coeur fidèle a son signe et son voeu :
Edmond l’honneur ; Mathilde Edmond lui-même ;
Mais ces soupirs, tressaillement que j’aime,
Sont-ils de moi, d’une vierge de Dieu ?
De mon cou nu lève ta main légère ;
Eveille-toi ! je ne suis point ta mère !
M’est-il permis le baiser de l’enfant,
Ce vague heureux qu’en le berçant prolonge
Ma solitude, et, la nuit, dans un songe
L’enfant Jésus reparu plus souvent ?
De mon cou nu lève ta main légère ;
Eveille-toi ! je ne suis point ta mère !
Mais non, mon Dieu n’est pas un Dieu cruel ;
Par ce front pur, en cette claire allée,
Tenterait-il sa servante exilée,
Dieu des petits et de Ruth et Rachel ?
Dors, cher Enfant ; je sens ta main légère
A mon cou nu de plus près s’attacher,
Ton frais baiser en mon sein se cacher ;
Dors, cher Enfant ; je suis encor ta mère !
Je n’ai jamais lu sans émotion une page que je demande la permission de citer pour la faire ressortir. C’est le cri du coeur de bien des mères sous l’Empire, que Madame de Souza, par un retour sur elle-même et sur son fils, n’a pu s’empêcher d’exhaler. Madame de Revel, malheureuse dans son intérieur, se met à plaindre les mères qui n’ont que des filles, parce qu’aussitôt mariées, leurs intérêts et leur nom même séparent ces filles de leur famille. Pour la première fois depuis la naissance de Mathilde, elle regrettait de n’avoir pas eu un fils : « Insensée ! s’écrie madame de Souza interrompant le récit ; comme alors ses chagrins eussent été plus graves, ses inquiétudes plus vives ! – Pauvres mères, vos fils dans l’enfance absorbent toutes vos pensées, embrassent tout votre avenir, et, lorsque vous croyez obtenir la récompense de tant d’années en les voyant heureux, ils vous échappent. Leur active jeunesse, leurs folles passions les emportent et les égarent. Vous êtes ressaisies tout à coup par des angoisses inconnues jusqu’alors.
Pauvres mères ! il n’est pas un des mouvements de leur coeur qui ne fasse battre le vôtre. Hier enfant, ce fils est devenu un homme ; il veut être libre, se croit son maître, prétend aller seul dans le monde… Jusqu’à ce qu’il ait acheté son expérience, vos yeux ne trouveront plus le sommeil que vous ne l’ayez entendu revenir ! Vous serez éveillées bien long-temps avant lui ; et les tendres soins d’une affection infatigable, ne les montrez jamais. Par combien de détours, de charmes, il faudra cacher votre surveillance à sa tête jeune et indépendante !
Dorénavant tout vous agitera. Cherchez sur la figure de l’homme en place si votre fils n’a pas compromis son avancement ou sa fortune ; regardez sur le visage de ces femmes légères qui vont lui sourire, regardez si un amour trompeur ou malheureux ne l’entraîne pas !
Pauvres mères ! vous n’êtes plus à vous-mêmes. Toujours préoccupées, répondant d’un air distrait, votre oreille attentive reçoit quelques mots echappés à votre fils dans la chambre voisine… Sa voix s’élève… La conversation s’échauffe… Peut-être s’est-il fait un ennemi implacable, un ami dangereux, une querelle mortelle. Cette première année, vous le savez, mais il l’ignore, son bonheur et sa vie peuvent dépendre de chaque minute, de chaque pas. Pauvres mères ! pauvres mères ! n’avancez qu’en tremblant.
Il part pour l’amée !… Douleur inexprimable ! inquiétude sans repos, sans relâche ! inquiétude qui s’attache au coeur et le déchire !… Cependant si, après sa première campagne, il revient du tumulte des camps, avide de gloire, et pourtant satisfait, dans votre paisible demeure ; s’il est encore doux et facile pour vos anciens domestiques, soigneux et gai avec vos vieux amis ; si son regard serein, son rire encore enfant, sa tendresse attentive et soumise vous font sentir qu’il se plaît près de vous… oh ! heureuse, heureuse mère ! »
– Ceci s’imprimait en 1811 ; Bonaparte, dit-on, lut quelque chose du livre et fut mécontent.
(Il ne l’était pas du reste toujours. Une fois, au retour d’un voyage à Berlin, madame de Souza arrivait à Saint-Cloud pour voir l’impératrice Joséphine. L’Empereur était sur le perron, impatient de partir pour la chasse ; les fougueux équipages, au bas des degrés, trépignaient. La vue d’une femme le contraria, dans l’idée sans doute que ce serait une cause de retard pour l’impératrice qu’il attendait. Il s’avança le front assez sombre vers madame de Souza, et, la reconnaissant, il lui demanda brusquement : « Ah ! vous venez de Berlin ? eh bien ! y aime-ton la France ? » – Elle vit l’humeur au front du sphinx redoutable : Si je réponds oui, songea-t-elle, il dira, c’est une sotte ; si je réponds non, il y verra de l’insolence… – « Oui, sire, répondit-elle, on y aime la France… comme les vieilles femmes aiment les jeunes. « La figure de l’Empereur s’éclaira : « Oh ! c’est très bien, c’est très bien ! » s’écria-t-il deux fois, et comme la félicitant d’être si heureusement sortie du piège. Quant à madame de Souza, récompensée par le glorieux sourire, elle aime à citer cet exemple pour preuve que l’habitude du monde et de laisser naître ses pensées les fait toujours venir à propos : « car, dit-elle, cette réponse s’était échappée si à part de ma volonté, et presque de mon esprit, que je fus tentée de me retourner aussitôt pour voir si personne ne me l’avait soufflée. »)
Nous ne dirons rien des autres écrits de madame de Souza, de mademoiselle de Tournon, de la duchesse de Guise, non qu’ils manquent aucunement de grâce et de finesse, mais parce que l’observation morale s’y complique de la question historique, laquelle se place entre nous, lecteur, et le livre, et nous en gâte l’effet. Mademoiselle de Tournon est le développement d’une touchante aventure racontée dans les Mémoires de Marguerite de Valois. L’auteur de Conq-Mars a su seul de nos jours concilier (bien qu’imparfaitement encore) la vérité des peintures d’une époque avec l’émotion d’un sentiment romanesque. On était moins difficile du temps de la princesse de Clèves, on l’était moins du temps même où parut mademoiselle de Clermont ; on ne saurait s’en plaindre ; si cette charmante nouvelle n’était pas faite heureusement, pourrait-elle se tenter aujourd’hui qu’on a lu dans le méchant grimoire de la Princesse Palatine : « Madame la duchesse avait les trois plus belles filles du monde. Celle qu’on appelle mademoiselle de Clermont est très belle, mais je trouve sa soeur la princesse de Conti plus aimable. Madame la Duchesse peut boire beaucoup sans perdre la raison ; ses filles veulent l’imiter, mais sont bientôt ivres et ne se savent pas gouverner comme leur mère. « Oh ! bienheureuse ignorance de l’histoire, innocence des romanciers primitifs, où es-tu ?
Ceux qui ont l’honneur de connaître madame de Souza trouvent en elle toute cette convenance suprême qu’elle a si bien peinte ; jamais de ces paroles inutiles et qui s’essaient au hasard, comme on le fait trop aujourd’hui, un tour d’expression net et défini, un arrangement de pensées ingénieux et simple, du trait sans prétention, des mots que malgré soi l’on emporte, quelque chose enfin de ce qu’a eu de distinctif le dix-huitième siècle depuis Fontenelle jusqu’à l’abbé Morellet, mais avec un coin de sentiment particulier aux femmes. Moraliste des replis du coeur, elle croit peu au grand progrès d’aujourd’hui ; elle serait sévère sur beaucoup de nos jeunes travers bruyans, si son indulgence aimable pouvait être sévère. L’auteur d’Eugène de Rothelin goûte peu, on le conçoit, les temps d’agitation et de disputes violentes. Un ami qui l’interrogeait, en 1814, sur l’état réel de la France jugée autrement que par les journaix, reçut cette réponse, que l’état de la France ressemblait à un livre ouvert par le milieu, que les ultras y lisaient de droite à gauche au rebours pour tâcher de remonter au commencement, que les libéraux couraient de gauche à droite se hâtant vers la fin, mais que personne ne lisait à la page où l’on était. La maréchale d’Estouteville pourrait-elle dire autrement de nos jours ? – Une épigraphe d’un style injurieux lui ayant été attribuée par mégarde dans un ouvrage assez récent, madame de Souza écrivit ce mod-le de rectification où l’on reconnaît tout son caractère : « M*** a été induit en erreur, ce mot fut attribué à un homme de lettres ; mais, quoiqu’il soit mort depuis long-temps, je ne me permettrai pas de le nommer. Quant à moi, je n’ai jamais écrit ni dit une sentence fort injuste qui comprend tous les siècles, et qui est si loin de ces convenances polies qu’une femme doit toujours respecter. » L’atticisme scrupuleux de madame de Souza s’effraie avant tout qu’on aie pu lui supposer une impolitesse de langage. »
SAINTE-BEUVE
– Madame de Souza est morte à Paris, le 16 avril 1836, conservant, jusqu’à son dernier moment, toute la bienséance de son esprit et l’indilgence de son sourire.