Les résidences successives de Charles de Flahaut
Une carrière militaire au service de Napoléon 1er parcourant toute l’Europe au cours de ses Campagnes… puis une carrière diplomatique dans la seconde partie de sa vie, au service de Napoléon III : pas facile pour le général-comte de Flahaut d’établir durablement une résidence.
Jusqu’à son engagement dans la Grande Armée en 1800, il suivit les périples, parfois douloureux, de sa mère condamnée à l’exil à tavers l’Europe.
Puis, lors de ses permissions de campagnes, il retrouvait volontiers sa mère, puis s’habitua peu à peu à fréquenter les salons, les cercles divers, et passa beaucoup de temps chez ses maîtresses, notamment à l’Hôtel de la rue Cerutti (aujourd’hui rue Laffitte) où logeait Hortense de Beauharnais. (hôtel détruit en 1899)
Durant la Restauration et le Second Empire, il alterna ses séjours entre la France et l’Ecosse, après avoir épousé Margaret Mercer Elphinstone, fille de Lord Keith en 1817. Ses fonctions d’ambassadeurs le conduisirent également à Vienne, puis à Londres.
1) Enfance et jeunesse avec ses parents
Né rue de Grammont, à Paris, en 1785, de la liaison entre Adélaïde Flahaut et Talleyrand, Charles de Flahaut résida au Louvre, dans un logement attribué par le frère de M le comte de Flahaut, le marquis d’Angiviller, directeur des Bâtiments du roi.
Le Vieux Louvre, du temps de Mme de Flahaut
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Mais la Révolution perturba cette installation, et en 1792, elle dut s’exiler en Angleterre ; le comte de Flahaut de la Billarderie, espérant échapper à la Terreur resta en France, mais il fut condamné et exécuté malgré tout.
En octobre 1792, Charles et sa mère s’établirentà Mickleham, dans les environs de Londres, chez l’habitant, les anglais accueillant volontiers les émigrés de la Révolution Française. Elle passa l’hiver 1794 dans une modeste chambre confortable, au 27 Half-Moon Street, dans le quartier calme de Southwark
27 Half-Moon Street, en 2007
(photo de Pierre Combaluzier) |
Talleyrand, le père de Charles, lui aussi exilé, ne daigna pas aider son fils et sa mère à subvenir à leurs besoins. Mme de Flahaut vécut grâce à différents emplois et à sa plume.
A la fin de l’été 1794, elle fut invitée par son ami, le général Montesquiou, à venir à Bremgarten, en Suisse, qu’elle rejoignit après une escale en Hollande, à Utrecht.
Elle reconnut le jeune duc d’Orléans, futur Louis-Philippe, qui se cachait dans cette ville, et décida de l’aider à partir pour l’Amérique. A partir du 10 mars 1795, elle l’accompagna ainsi, avec son fils Charles, à Hambourg, après un arrêt à Kiel. Mais les conditions de vie étaient plus difficiles qu’en Angleterre.
Après Hambourg, destination Altona, où résidait une importante colonie d’émigrés français ; elle logea dans une petite maison meublée, grande rue des Moulins, qui appartenait à Madame la princesse douairière de Holstein-Beck.
Durant toute cette période d’exil, Mme de Flahaut veilla particulièrement à l’éducation de son fils, qui maîtrisa parfaitement les langues anglaise et allemande, malgré des séjours épisodiques dans des établissements d’enseignement.
Grâce à l’intervention de Talleyrand qui put la faire radier de la liste des émigrés, Mme de Flahaut et son fils Charles retrouvèrent le sol français en 1799. Elle put s’installer dans une gentilhommière, le Mesnil-Bernard, laissée par un vieil oncle Longpré décédé, qui lui permit de jouir de quelques revenus médiocres.
2) Retours épisodiques auprès de sa mère lors des campagnes napoléoniennes
En mars 1802, sa mère s’installa au petit château de Césy, près de Joigny, puis après son mariage avec le diplomate portugais M de Souza, le 17 octobre 1802, habita au 12 rue d’Anjou à Paris
Après plusieurs déménagements, ils s’installèrent plus durablement, durant l’été 1805, dans un hôtel d’assez belle apparence, au 6 rue Grande-Rue-Verte, aujourd’hui rue de Penthièvre. Cette maison assez grande, agrémentée d’un jardin ombragé environné de roses, permettait de loger les enfants respectifs des deux époux, quand ils étaient de passage. Ils y menèrent grand train et Madame de Souza réouvrit son salon.
Charles de Flahaut y passa tout l’été 1814.
Les fidèles de Napoléon furent inscrits sur la liste des proscrits. Talleyrand était intervenu pour que le nom de Flahaut fut rayé de cette liste, mais il lui était préférable de quitter le sol français au plus vite.
Le 17 juillet 1815, il obtint un passeport pour Aix les Bains où il revit Hortense (prétextant les eaux) ; les autorités estimèrent que cette rencontre était nuisible à la sureté de l’Etat et la fuite mena Charles de Flahaut à Genève (15 août 1815)
puis dans une petite location à Chambezy (dans l’arrondissement de Gex), puis à l’Hôtel de Provence (Lyon, septembre 1815), dans une auberge en semi-captivité (Besançon, octobre 1815)
Il se retrouva à Francfort, en Allemagne, au mois de novembre, puis à Rotterdam et enfin en Angleterre en 1816, l’asile préférentiel de tous les proscrits.
D’abord installé à Brighton, il se retrouva ensuite à Londres, au 32 Thayer Street, non loin de Manchester Square.
3) Installation en Ecosse, séjours en France, et ambassade de Vienne et de Londres.
Lors de ses séjours en France, ils séjournèrent surtout chez M et Mme de Souza. Vous trouverez donc ci-dessous la suite du parcours résidentiel de M et Mme de Souza.
Il épousa Margaret Mercer Elphinstone le 13 juillet 1817. Les nouveaux époux résidèrent à Edimbourgh à partir d’octobre 1818 et à Drummond Castle, en Écosse, tout proche du Loch Katrin,
Drummond Castle
En 1819 , ils séjournèrent en France
Lord Keith, beau-père de Charles de Flahaut mourut en 1822. Le couple Flahaut s’installa donc au château de Tullyalan, près de Kincardine on Forth, Comté de Perth, une maison sans style mais au coeur d’un très beau parc avec des arbres admirables et une chasse excellente.
En août 1827, ils s’installèrent à Paris.
En 1830, Charles de Flahaut signe l’acquisition d’un bel hôtel au coin de la rue de la Charte , ancienne rue d’Angoulême, la future rue La Boétie – et des Champs Elysées. C’est une demeure vaste sans être grande, élégante, qui convenait à la fois à l’intimité familiale et à la vie de société. Une large terrasse s’ouvrait sur les Champs Elysées. Vers la rue d’Angoulême, un beau jardin, presque un parc, et de nombreuses dépendances agrémentaient cette demeure. Françoise de Bernardy relate l’historique de cet hôtel dans son ouvrage « Flahaut » paru aux éditions Perrin en 1974 :
« Le duc de Richelieu, fils du maréchal, acheta en 1788 le futur hôtel de Massa, sans doute comme Folie. Il fit aménager le jardin, il y plaça les deux Esclaves de Michel-Ange aujourd’hui au Louvre. Le duc émigra en 1790 et la maison resta déserte, abandonnée. Il fallut l’Empire, la création du royaume d’Italie pour que l’hôtel de Le Boursier rouvrît ses portes. Marescalchi, ministre du royaume d’Italie, en devint locataire en 1805. Fastueux, il multiplia les fêtes et sa maison fut le rendez-vous de la noblesse de l’Empire. En 1809, il y reçut Napoléon, à la veille de partir pour la campagne de Wagram.
L’Empire tombé, Marescalchi quitta l’hôtel de la rue d’Angoulême, qui fit retour à la comtesse de Durfort, fille de Thiroux de Montsauge. Elle le vendit en 1825 à Bellel, un entrepreneur de bâtiments, mais sa fille, Mme de Juigné, femme du maréchal de camp, le racheta en 1827. Elle le céda aux Flahaut, après la révolution de Juillet, pour une somme de 250.000 francs. » |
Historique complet sur wikipedia
Hôtel Thiroux de Montsauge (emplacement originel), photographie d’ Eugène Atget ( 1906 )
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La famille Flahaut y séjourna pendant 23 ans, puis en fit cession à la baronne de Royer. Le fondé de pouvoir du vendeur en 1853, n’est autre que Morny (aujourd’hui hôtel de Massa-Régnier)
Le duc de Morny s’y installa, bien que, suivant tous les annuaires et l’Almanach royal, depuis qu’il était député, son adresse officielle était : 17, rue de la Rochefoucauld.
L’hôtel fut revendu en 1853, pour la somme de 800.000 francs, au baron Roger.
En 1928, il est donné à l’Etat, qui le met à la disposition de la Société des Gens de Lettres
D’octobre 1841, au 6 mars 1848, Charles de Flahaut, d’abord seul, puis rejoint par sa femme, occupa le poste d’ambassadeur à Vienne. Un logement fut mis à sa disposition.
Printemps et ‘été 1848 : ils louèrent Londres d’une maison dans Eaton Square, non loin de Hyde Park
En 1849, ils louèrent une autre maison à Grosvenor Square, à quelques pas de l’ambassade de France, puis Coventry House, un bel hôtel dessiné par Kent, 106 Piccadilly (après leur départ, cet hôtel devint le Saint James’Club)
En septembre 1849, ils retrouvèrent l’Ecosse à Tullyallan au château de la famille Keith.
En novembre 1860, Charles de Flahaut est nommé ambassadeur à Londres.
Il fit aménager un logement à Albert Gate House dont la réfection fut couteuse. Mais ils ne s’y sentirent jamais chez eux, et se réinstallèrent à Grosvenor Square
Charles de Flahaut mourut en 1870. Sa dernière demeure fut au cimetière de Montmartre.
Photographies de Bernard Cot et Dominique Médard
(collection Robert Chénier) |
4) Résidences de M et Mme de Souza, après 1815
Depuis l’été 1805, M et Mme de Souza sont donc installés au 6 Grande-Rue-Verte à Paris.
Mais M de Souza est malade ; en juillet 1824 le couple quitta à regret l’ hôtel de la rue Verte et s’installa entre cour et jardin, 22, rue de la Ville-l ‘Evêque.
La cause semble provenir de raisons familiales : problèmes financiers avec le fils de M de Souza, le comte portugais de Villa-Réal.
M de Souza décède en 1824, et en juin 1829, Mme de Souza doit déménager pour laisser la place à dom José-Luis, le fils de feu M. de Souza qui réserve cette demeure aux visites de ses enfants. Avec la rente viagère que celui-ci lui verse, elle loue un appartement au 7 de la rue Saint-Florentin (Talleyrand habite alors au 2), un hôtel construit par Gabriel.
Adélaïde de Souza, dont les ressources sont amoindries par les révolutions qui secouent le Portugal, ne peut plus assumer les frais de la résidence de la rue Saint-Florentin. Elle s’installe en 1830 au 50, rue Saint-Honoré, dans un appartement plus modeste dont le principal ornement est une chambre à coucher encombrée d’une vaste table ronde surchargée de livres ; c’est là qu’elle reçoit les siens, ne sortant plus que rarement dans le monde.
En 1837, elle fut enterrée au cimetière du Père-Lachaise, section 30, ligne 8.