Correspondance entre Napoléon 3 et Charles de Flahaut
de 1849 à 1865
1849
Louis-Napoléon à Charles de Flahaut
« Mon cher général, je suis bien fâché que cette indisposition m’avait empêché de vous recevoir et… »
Elysée Nationale, 24 avril 1851
Louis-Napoléon à Charles de Flahaut
Mon cher général,
Je suis bien fâché qu’une indisposition m’avait [sic] empêché jusqu’à ce jour de vous recevoir, et il me tarde de vous renouveler l’assurance de mes sentiments affectueux. Venez donc dîner ce vendredi à trois heures. Je serai heureux de causer avec vous.
Croyez à ma haute estime
LOUIS-NAPOLEON B.
Elysée Nationale, 2 décembre 1851
Louis-Napoléon à Charles de Flahaut
» Mon cher général,
Je vous verrai avec grand plaisir venir avec moi à cheval, ce matin vers huit heures. Recevez l’assurance de mes sentiments de haute estime.
LOUIS-NAPOLEON B. »
30 janvier 1852
Charles de Flahaut à Louis-Napoléon
» Lorsque je comptais venir à Paris (croyais retourner à Paris), Lord John Russell m’avait demandé (prié) de vous rapporter (rendre compte d’) une ou deux conversations que j’avais eues avec lui. Elles étaient relatives aux débats parlementaires (aux discussions qui vont avoir lieu dans le Parlement) sur (les motifs du) le renvoi de Palmerston. Comme il est dû à une question regardant la France (et comme les affaires de la France en ont été l’occason), Lord John était particulièrement désireux de vous donner l’assurance que, quoi qu’on puisse dire (quelle que fût leur nature), vous pouviez être certain que rien ne troublerait les amicales relations entre les deux gouvernements et les deux pays (rien ne serait changé dans les relations amicales des deux gouvernements et des deux pays). Si je peux me permettre d’exprimer une opinion, je crois que vous pouvez compter sur cette promesse.
Peut-être, monseigneur, me permettrez-vous aussi de saisir l’occasion de vous parler de quelque chose me concernant (un peu de moi).
Je vous demande de croire que c’est avec un vrai plaisir (une joie bien vive) que je me suis replacé (rallié), le 2 décembre, sous le drapeau auquel j’avais consacré ma jeunesse. Quand j’ai eu l’honneur de prendre congé de vous, les phrases aimables (les paroles bienveillantes) par lesquelles vous m’avez exprimé votre approbation ont été une récompense suffisante des faibles services que j’avais été assez heureux pour vous rendre. Si, depuis lors, je me suis trouvé en désaccord (dissentiment) avec certaines mesures que vous avez jugé nécessaire de prendre (vous avez cru devoir adopter)et si j’ai décidé de retourner à ma retraite et à mon inactivité, je tiens à vous donner l’assurance que j’ai fait seulement ce qui me semblait droit dans la circonstance (je n’ai été mu que par un sentiment de convenance) ; ma gratitude envers vous est telle que rien ne serait plus contraire à mes idées ou à mes sentiments que de faire preuve d’active opposition (que de me laisser aller à un acte d’opposition) ou, plus encore, d’une désapprobation marquée (une manifestation éclatante de désapprobation)
Ma conduite pendant le coup d’Etat a causé le plus vif mécontentement à la famille royale déchue et m’a attiré l’hostilité la plus vive de tout le parti orléaniste. Ne croyez pas, Monseigneur, que je me sois flatté d’atténuer en rien ces dispositions par ma conduite actuelle – j’ai trop d’expérience pour cela ; mais je n’en tiens que davantage à ne donner à personne le droit de m’accuser d’avoir manqué de reconnaissance.
Croyez, Monseigneur, que je continuerai ici la tâche que je sui venu y remplir, que mes voeux les plus ardents sont pour votre succès, et que je regrette du fond de mon âme d’être privé de l’honneur d’y contribuer par mes services. Et croyez aussi que je serai toujours prêt, comme au 2 décembre, à vous donner des preuves de mon dévoûment , si jamais il pouvait vous être utile.
Veuillez agréer avec bonté, Monseigneur, l’hommage de mon profond respect.
FLAHAULT »
Elysée Nationale, le 11 février 1852
Louis-Napoléon à Charles de Flahaut
» J’ai été très content (bien heureux) d’avoir de vos nouvelles, car je ne peux oublier les preuves de loyauté (dévouement) que vous m’avez données, et je regrette (regrettais) profondément (vivement) que quelque chose soit venu interrompre nos bonnes et sympathiques relations.
Je ne regrette pas moins (Je regrettais également) qu’une décision que je considérais comme indispensable ait forcé Morny à démissionner (se retirer), car j’ai pour lui la plus grande affection (j’éprouve pour lui une réelle amitié)
J’espère, mon cher Général, que vous me permettrez à la première occasion de mettre votre nom sur la liste du Sénat ; car personne n’a plus de titres que vous pour y figurer, et personne ne peut y apporter plus de lumière, plus d’autorité et de patriotisme.
J’ai été satisfait des discours du Ministère au Parlement, néanmoins je ne puis me dissimuler que les bruits de guerre qui sont si absurdes, sont propagés et encouragés par le Gouvernement anglais lui-même.
Je désire bien vivement vous voir et vous renouveler l’expression de ma haute estime et de mon amitié.
LOUIS-NAPOLEON. »
29 mars 1852
Charles de Flahaut à Louis-Napoléon
Monseigneur,
Je n’ai pas abusé de la permission que vous m’avez donnée de vous écrire, mais j’espère que vous ne trouvez pas mauvais que j’en use aujourd’hui pour vous exprimer le plaisir que m’ont fait quelques-uns des décrets que vous avez rendus dernièrement. C’était la bonne manière de faire taire la presse malveillante, ou de la réduire à l’impuissance (liberté de la presse virtuellement supprimée), car il est impossible qu’elle n’enreconnaisse les bons résultats. Ils ont été aussi une arme puissante pour ceux de vos partisans qui désirent le succès de votre cause et, croyez-bien, Monseigneur, en désirent le triomphe.
Permettez-moi cependant de saisir cette occasion pour vous parler du mauvais effet que produit ici la prolongation du séjour des exilés. Ils sont reçus dans tous les salons, et la modération de leur langage ajoute encore au blâme de la mesure qui les tient éloignés de leur pays.
On a répandu aussi le bruit que M. Thiers obtiendrait la permission d’y rentrer, s’il en faisait la demande par écrit ; et on s’étonne qu’une telle condition soit un obstacle au retour d’un homme que n’a frappé aucun jugement, aucune condamnation ; et même ceux qui ne blâment pas le mesure en elle-même, trouvent que de la part d’un gouvernement fort et juste, elle ne saurait être justifiée que par la nécessité. Or, ddisent-ils, cette nécessité n’existe pas, puisque, sur leur demande, la permission de rentrer serait accordée.
Vous avez plusieurs fois daigné m’écouter avec bonté, mais j’ai cependant besoin d’ajouter que c’est votre intérêt surtout qui me préoccupe ; que depuis deux ans je suis brouillé avec M. Thiers ; que je n’ai pas aperçu sa figure depuis que je suis en Angleterre, et qu’il serait bien étonné s’il savait que je plaide sa cause…
Mai 1852
Charles de Flahaut à Louis-Napoléon
En mai 1852, Flahaut écrivit au Prince pour qu’il autorisât le retour de Thiers.
12 octobre 1861
Louis-Napoléon à Charles
» Mon cher comte de Flahaut, j’apprends par M Thouvenel que notre conversation au sujet du Mexique ne marche pas, je veux vous exprimer franchement mes idées, afin que vous les communiquiez à Lord Palmerston. Lorsque le Premier ministre sera au fait des intentions que j’apporte dans cette affaire, j’espère qu’il voudra bien vous dire aussi clairement le fond de sa pensée et qu’il en résultera une entente et une action commune.
Surtout les outrages du gouvernement mexicain sont venus donner des raisons légitimes à l’Angleterre, à l’Espagne et à la France d’intervenir au Mexique. Dans quel sens cette intervention doit-elle être dirigée ? Voilà la question.
Je conçois très bien que la convention entre les trois puissances qui enverront des forces en Amérique n’établisse comme but ostensible de notre intervention que le redressement de nos griefs légitimes, mais il faut prévoir ce qui peut arriver et ne pas bénévolement se lier les mains pour empêcher une solution qui serait dans l’intérêt de tous…
J’ai mis en avant le nom de l’archiduc Maximilien. Cette idée a été acceptée avec bonheur par le petit comité résidant en France… De mon côté, je l’avoue, j’ai cru qu’il était de bon goût de ma part de proposer comme candidat éventuel un prince appartenant à une dynastie avec laquelle j’étais récemment en guerre. »
27 novembre 1863
Charles de Flahaut à Napoléon III
La commission dont j’avais l’honneur de faire partie et aux travaux de laquelle Votre Majesté vient de mettre un terme a apporté, dans l’accomplissement de la tâche dont vous l’avez chargé, tout le zèle dont elle était capable ; et il ne lui a manqué, pour que ses efforts fussent couronnés de succès, qu’une bonne direction, que Votre Majesté seule était en position et en état de lui donner. Il fallait qu’elle apprît de vous, Sire, ce que je me suis souvent permis de lui dire, qu’au lieu de ce respect aveugle dont elle était animée pour tout ce qui lui paraissait émané du grand homme, elle aurait dû ne reproduire que ce qui était de nature à rendre, s’il était possible, sa mémoire encore plus illustre ; enfin ce qu’il aurait publié lui-même, s’il eut pu être consulté.
Pardonnez-moi, Sire, si j’ai pris la liberté de vous écrire à cette occasion ; mais resté seul de tous ceux qui ont eu l’honneur d’approcher ce grand homme, et sa mémoire ayant toujours été ce que j’ai de plus cher, j’ai cru que vous me permettriez de vous soumettre ces courtes observations, qui pourraient encore être utiles si vous vouliez bien les adresser à mes successeurs.
Je suis, Sire, avec le plus profond respect, de votre Majesté le très obéissant serviteur et fidèle sujet,
Flahault.
3 décembre 1863
Napoléon III à Charles de Flahaut
L’Empereur Napoléon III à Flahault
Compiègne, le 3 Décembre 1863.
Mon cher Comte de Flahault,
J’ai arrêté la publication des lettres de l’Empereur, parce que je me suis aperçu qu’on avait publié des lettres qu’on aurait aussi bien fait de supprimer. En dernier lieu le Prince Napoléon m’a cité plusieurs faits qui ont attiré mon attention et m’a remis le rapport ci-joint. Je vous prie de le lire avec attention et de me dire votre avis. La chose qui me paraît grave serait, comme me le propose mon cousin, de recommencer la publication.
J’ai mis au crayon le nom des personnes qui faire partie de la commission. J’espère que vous voudrez bien encore en faire partie, car le Prince Napoléon se plaît à reconnaître que vous êtes le seul qui ayez mis dans ce travail un discernement éclairé, basé sur un véritable dévouement à la mémoire de l’Empereur.
Je saisis avec plaisir cette occasion pour vous renouveler l’assurance de ma sincère amitié.
Napoléon.
Note sur la Correspondance de Napoléon Ier
[Dec. 1863.]But de la publication
Je partage entièrement les opinions à ce sujet exprimées dans la note.
Caractère de la Publication
Il me semble qu’il y a dans cette partie de la note des opinions avancées un peu légèrement sur quelques membres de la commission, et je dois dire que je ne me suis jamais aperçu qu’aucun d’eux ait essayé de dénaturer ou écarter aucun des documens qu’on proposait de publier.
S’il y a un reproche à leur faire, c’est d’avoir, par un respect aveugle pour tout ce qui leur semblait émané de l’Empereur, été trop inclins à admettre dans ce recueil des pièces qui n’auraient pas dû s’y trouver.
Modifications à introduire dans cette Publication
Diviser le contenu en quatre grandes Catégories
Je crois que ce serait un très mauvais arrangement, et qui ôterait à la publication son caractère le plus remarquable.
N’est-ce pas, en effet, cette correspondance, traitant à la fois des sujets les plus divers : la grande politique générale, la guerre, l’administration de l’armée, l’administration intérieure de la France, les questions de morale philosophique et de morale religieuse, les relations de famille et d’affection, les établissemens de diverses sortes (comme cette lettre sur l’institut fondé à Ecouen pour l’éducation des filles des membres de la Légion d’honneur), qui est un chef-d’œuvre par le soin et l’habileté avec lesquels tout y est prévu et discuté.
Je le répète donc, ce qui est surtout remarquable, outre le génie et l’habileté avec lesquels ces sujets sont traités, c’est de voir qu’ils forment son occupation de chaque jour, à toutes les heures ; et ce cachet se perdrait (indépendamment de la difficulté de la classification) si on voulait adopter le système proposé, et au lieu d’un tableau synoptique de la vie journalière de l’Empereur, on aurait quatre recueils de pièces historiques, pour servir à l’histoire de son règne.
Un autre inconvénient encore qui résulterait de ce plan serait la nécessité de détruire tout ce qui a été fait jusqu’ici. Il faudrait redemander à tous les souverains, à toutes les bibliothèques , à tous ceux enfin qui les possèdent, les exemplaires qu’ils ont reçu.
Ne serait-il pas à craindre que cela n’inspirât l’idée que trop de franchise avait présidé à l’œuvre supprimée, et qu’on se propose d’être plus réservé à l’avenir ? Ce qui ne manquerait pas de jeter du doute et de la défaveur sur la nouvelle commission et publication.
L’Empereur m’ayant permis de lui dire mon avis, j’ai l’honneur de le lui soumettre en toute sincérité, et je le prie de me permettre d’attendre sa résolution, avant d’accepter la proposition de faire partie de la commission, que j’ai reçue avec une profonde reconnaissance.
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