" Laissez-moi vous dire que de mes réflexions, de mes conversations fréquentes avec M de Flahaut, qui est fort attaché à l'empereur et à vous personnellement puisque je crois que votre démission entraînerait la sienne, car il ne servirait pas sous ceux qu'on désigne comme devant vous remplacer, il résulte cette modification dans mon esprit, qu'après la publication récente au Moniteur de la lettre de l'empereur et des autres pièces, je ne vois pas autant de nécessité de prendre un parti violent immédiatement (Le 25 septembre, Fould avait arraché à Napoléon III l'autorisation de publier au Moniteur la correspondance échangée avec Rome en mai et juin et les partisans de l'évacuation avaient aussi marqué un point.). Bien que ces pièces n'indiquent pas une solution positive, elles indiquent une tendance et forment pour l'opinion une étape, un repos. Il ne faut pas se dissimuler que cette question est très grave, que la solution que vous souhaitez va entraîner dans une très grande irritation tout le parti catholique, que tout souverain français doit compter avec ce parti, que le lendemain d'une décision on n'a plus devant soi que ses inconvénients et ses conséquences et qu'on oublie tous ceux du parti opposé qu'on n'a pas pris. Il me semble que ces publications ont donné une certaine satisfaction à l'opinion publique, même en Italie, et que peut-être, tout en restant ferme dans la même voie, le moment ne serait pas venu de tout brusquer…"
* Flahaut (Françoise de Bernardy / Perrin / p.360-361)
" L'Empereur a été très affecté (par la démission de Charles) ; il m'a chargé de vous le dire. S'il avait connu votre détermination, il eût préféré renoncer à Drouyn de Lhuys ; il voudrait beaucoup vous voir consentir à rester à votre poste, disant que c'est lui et la France que vous servez et non M Drouyn de Lhuys."
* Flahaut (Françoise de Bernardy / Perrin / p.361-362)
" Je veux commencer par vous entretenir d'un petit incident dont on me dit qu'on a fait une grosse affaire à Paris, je veux parler des visites de la reine Marie-Amélie et des princes de la famille d'Orléans à l'Exposition française.
Je m'y trouvais à leur première visite, et bien que je me sois tenu à l'écart, j'ai pu observer de loin la façon dont les choses se sont passées, du moins sur quelques points. Il n'est pas douteux que les manières des différents membres de cette famille envers les exposants des vitrines près desquelles ils se sont arrêtées n'aient été remplies de bienveillance et de gracieuseté et n'aient dû les remplir de reconnaissance, mais je ne me suis aperçu d'aucune manifestation extraordinaire et publique, et les renseignements que j'ai pu recueillir ne m'en ont point signalé. Je suis convaincu du reste par la connaissance que j'ai des dispositions des princes, excepté le prince de Joinville, que quelque regret qu'ils éprouvent de leur chute et quelque désir qu'ils aient de recouvrer le trône qu'ils ont perdu, ils ne feront aucune tentative pour y remonter et je crois que ce que nous pourrions faire de plus malhabile et de plus impolitique serait de nous montrer susceptibles ou préoccupés de leurs faits et gestes, enfin inquiets à leur égard."
* Flahaut (Françoise de Bernardy / Perrin / p.357)
" L'empereur sera ici le 4 octobre… Je regarderais comme très utile que le duc de Morny fût ici au retour de Sa Majesté. M de La Valette arrivera mercredi prochain et le moment approche où il faudra discuter sérieusement de la question romaine."
* Flahaut (Françoise de Bernardy / Perrin / p.360)
"La politique de Walewski nous conduit à la catastrophe, répète-t-il à son père. Il ne la poursuit que par entêtement et ambition personnelle".
* Morny, l'homme du second empire (Dufresne / Perrin / p.336-337)
" Les princes d'Orléans, depuis le coup d'Etat, ont toujours fait semblant de ne pas me voir et il en est résulté que, lorsque je les ai rencontrés, j'ai agi de même."
* Flahaut (Françoise de Bernardy / Perrin / p.357)
" La question romaine est et continuera d'être pour nous une sorte d'embarras inextricables, car elle se compose d'intérêts que rien ne saurait concilier. Je suis fermement convaincu que le pape opposera une force d'inertie inébranlable à faire aucune espèce de concessions ; il sera résigné, se soumettra en victime à la force, mais se refusera de la manière la plus absolue à reconnaître aucun changement en ce qui touche au patrimoine de Saint Pierre. C'est une affaire de conscience d'une part, et peut-être de l'autre est-ce d'une habile politique, car la force du souverain pontife se trouve surtout dans sa faiblesse. Il ne sait que trop que ce serait comme victime qu'il nous causerait le plus d'embarras.
J'ai vu sous Napoléon 1er le pape amené à Fontainebleau et j'ai vu aussi alors des gens à qui je ne soupçonnais aucun zèle religieux devenir tout à coup les défenseurs les plus ardents des intérêts de l'Eglise…"
* Flahaut (Françoise de Bernardy / Perrin / p.359)
Monsieur le Ministre, j'ai communiqué hier au Principal Secrétaire d'Etat de la Reine le contenu de la dépêche que Votre Excellence m'a fait l'honneur de m'adresser en m'envoyant le rapport de M. l'amiral Jurien de la Gravière.
Je suis heureux de pouvoir dire à Votre Excellence que lord Russell partage l'avis qu'elle exprimait sur la matière dont les affaires ont été conduites ; car une différence d'opinion entre les Gouvernements sur la marche suivie par leurs commissaires ne pourrait qu'aggraver considérablement les inconvénients de la situation. Lord Russell n'hésite pas à blâmer le langage qui a été tenu au Gouvernement mexicain comme en complète opposition avec les faits qui ont rendu la convention de Londres nécessaire ; il pense que les commissaires auraient dû, après avoir pris possession des ports, se borner à faire connaître au Gouvernement mexicain les griefs de leurs Cours et en demander le redressement, en fixant un délai, au terme duquel on aurait recours à l'emploi de mesures coercitives, si les satisfactions formulées n'étaient pas obtenues.
Le Principal Secrétaire d'Etat de la Reine n'approuve pas plus que nous la clause qui permet au pavillon mexicain de flotter à côté de ceux des trois Puissances, et l'engagement pris par les commissaires d'évacuer les points occupés par nos forces, si les négociations venaient à échouer. En résumé, Monsieur le Ministre, lord Russell partage, en tout point, la manière dont Votre Excellence apprécie la conduite adoptée par nos commissaires et la situation qu'elle a créée.
Signé Flahault
Le comte de Flahault
au Ministre des Affaires étrangères (Edouard Thouvenel)
Londres, le 11 janvier 1862
Monsieur le Ministre, la nouvelle de la restitution de MM. Slidell et Mason, arrivée avant-hier, a été, comme vous le savez, accueillie en Angleterre avec une satisfaction d'autant plus vive que la veille encore la rupture des relations avec l'Amérique du Nord, dont la guerre eût été la conséquence inévitable, y paraissait la solution la plus probable. Au milieu de l'expression de ce sentiment, ni le Gouvernement ni la nation britanniques ne méconnaissent l'inflence favorable au maintien de la paix qu'ont exercée sur le Cabinet fédéral l'attitude du Gouvernement de l'Empereur et celle de son représentant à Washington. Le Times d'hier se faisait l'écho de l'opinion publique, à cet égard, dans un article des plus remarquables. Les principaux membres du Cabinet, Lord Russell et Lord Palmerston entre autres, se sont empressés de reconnaître que l'opinion si nettement exprimée dans la dépêche de Votre Excellence à M. Mercier, en date du 3 décembre dernier, a puissamment contribué à amener le Gouvernement de l'Union à rendre les prisonniers saisis à bord du Trent, et Lord Lyons n'a pas manqué de rendre pleine justice dans ses rapports tant officiels que particuliers à la loyauté et à l'efficacité des bons offices de son collègue en France. Je suis même chargé aujourd'hui par le principal secrétaire d'Etat de Sa Majesté Britannique, que je viens de voir, de transmettre à Votre Excellence l'espression de ces sentiments au nom du Gouvernement de la Reine.
Signé FLAHAULT
Documents diplomatiques (Affaires étrangères 1861 - ????)
Monsieur le Comte, je reçois la dépêche que vous m'aviez fait l'honneur de m'écrire le 11 mars. je me félicite de voir que le cabinet de Londres n'admet pas plus que nous le point de départ de l'opposition que sir CH. Wyke avait manifestée contre l'ultimatum préparé par M. Dubois de Saligny, et d'apprendre que lord Russell va inviter M. le ministre d'Angleterre à se désister de cette opposition. L'opinion exprimée par le Principal Secrétaire d'Etat au sujet de nos réclamations m'engage toutefois à vous envoyer, pour que vous puissiez la mettre sous ses yeux, une appréciation de leur chiffre dont on ne saurait suspecter la partialité. Cette appréciation se trouve dans l'article ci-joint, tiré d'un journal de Mexico, le Mexican extraordinary, qui est l'organe accrédité des intérêts anglais dans ce pays. cette feuille, qui est loin d'avoir jamais témoigné des sympathies bien vives pour nos intérêts, n'hésite pas, dans un examen approfondi de la dette étrangère, à porter à 15 millions de piastres le montant de nos justes réclamations. Ainsi que je le supposais déjà d'ailleurs, celui des réclamations anglaises est plus élevé encore, puisque l'article ci-annexé, en admettant une réduction de 20 %, fixe alors le nôtre à 12 millions de piastres. Nous ne nous proposons en aucune façon d'examiner quelles sont l'origine et la légitimité de ces créances ; mais nous devons penser que lord Russell n'était pas lui-même parfaitement édifié jusqu'ici sur le chiffre que l'on demandait à faire figurer pour le compte des intérêts anglais à côté du nôtre.
Signe Thouvenel