Fin mai 1809
Anna Potocka (Mémoires)
" A trois heures, un cabriolet s'arrêta à la porte, et le pas d'un cheval que je ne confondais jamais avec un autre fit battre mon cœur.
Nous étions à la fin de mai, mais il faisait un froid si piquant que j'avais fait allumer du feu ; voulant me donner une contenance, je me mis à tisonner. Il avança un fauteuil et s'assit auprès de moi sans rompre le silence. Je levai alors les yeux et fut péniblement frappée du changement que cette courte indisposition avait produit. Néanmoins, j'eus la dureté de lui dire :
Vous avez donc été réellement malade ?
Non, fit-il, pas trop, et maintenant je suis bien.
Qu'avez-vous ?
Rien réellement. J'ai souffert, mais c'est passé. Toutes les fois que j'éprouve de vives émotions, je crache le sang, voilà tout.
J'ai pensé à vous plus que vous ne croyez
Ah ! ne me dites pas cela ! ne parlez pas ainsi… Traitez-moi toujours en vieil ami ; vous n'avez voulu de moi qu'à ce titre-là."
Flahaut (Françoise de Bernardy / Perrin / p.78-79)